Bonsoir à tous,
Ce matin j'avais du temps et je me suis dit que j'avais envie d'aller me balader ailleurs que dans le tramway, je suis donc allé sur une ligne de chronobus choisie au hasard : la ligne C1. J'attends à l'arrêt de bus et je commence à observer, les gens à l'arrêt de tramway. Je ne suis pas pressé j'ai du temps pour choisir ma future proie, hahaha !
Je vous présente Marï-Am Demba, bientôt 40 ans.
Elle m'expliquera plus tard la signification de son prénom qui est un prénom composé de tradition peuls : "Chez nous, on nous donne un prénom et on rajoute celui du père pour en faire un prénom composé. Les peuls sont une ethnie nomade d'origine égyptienne."
Dans la vie Marï-Am Demba travaille dans l'accompagnement de jeunes migrants : "Je suis une tisseuse de liens! On s'occupe de jeunes migrants qui viennent d'arriver sur le sol français, on dialogue beaucoup avec eux, mais aussi avec des jeunes dans les quartiers. Le but étant très simple : leur apprendre à vivre ensemble et les aider dans leur vie de tous les jours. Si j'aime ce que je fais? C'est littéralement une vocation! Dans ma tribu, on a tous un rôle dès notre naissance et le mien a toujours été d'aider les autres, que ce soit dans la vie de tous les jours ou auprès de mes proches.
J'interviens aussi dans des établissements scolaires afin de parler de l'Afrique, comment c'était avant, l'esclavagisme, etc. Toujours dans l'idée de créer du lien et du dialogue!
Une qualité pour être une bonne tisseuse de liens?
Il faut se sentir responsable de l'autre et l'amener à ce qu'il se sente responsable de moi. Je dis toujours que la liberté ce n'est pas l'autoriser mais se permettre de l'avoir."
Je lui demande de m'apprendre un truc sur son métier?
"Un truc que je dis tout le temps dans les établissements scolaires aux jeunes : Le terme noir pour désigner une personne de couleur a été inventé par l'occident. On ne s'est jamais dit que nous étions noirs, mais nous sommes kémite : ça ne désigne pas seulement une couleur de peau mais aussi un état d'esprit."
Marï-Am Demba aime faire de la photo, la danse, écrire et écouter les gens parler.
Elle n'aime pas les clichés, l'hypocrisie et le mensonge : "Je ne peux pas mentir pour du matériel mais pour du superficiel... Par contre je pourrais mentir si c'est pour sauver quelqu'un! L'Homme avec un grand H me fascine par sa complexité et me dégoûte en même temps. Quand tu vois que l'on empêche les gens de circuler et de vivre librement : ça me révolte."
Es-tu heureuse aujourd'hui?
"Oui très! Je suis tout le temps heureuse, je vis le bonheur immédiat, car même si hier ça n'allait pas, et bien c'est du passé : aujourd'hui est un autre jour et il sera meilleur que celui d'hier. " (rires)
Une personne qui t'a marquée ou t'influence encore aujourd'hui?
"Mon père : Demba! Bah oui je porte le prénom de mon père. (rires)
Pourquoi lui? Parce que c'est un grand sage peul. C'est un grand timide de 80 ans qui mesure 2 mètres et qui s'est ouvert aux autres toute sa vie. Il dit toujours qu'il n'a jamais subi le racisme de toute sa vie, pas une fois, mais qu'aujourd'hui il est inquiet pour l'avenir de ses petits enfants. Et je fais tout aujourd'hui pour qu'il ne soit pas inquiet pour nous!"
Le mot de la fin?
"Merci tout simplement."
Marï-Am Demba, j'ai adoré discuter avec toi, et finir ton interview en marchant quelques minutes, c'était passionnant! Ce soir c'est moi qui te remercie, j'espère que l'on se recroisera.
A.
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