Ce matin, sur le quai de Pirmil, je remarque une femme un peu à l’écart. Un gros casque sur les oreilles, plongée dans sa bulle. C’est ce détail qui me pousse à l’aborder.
Elle s’appelle Christelle. Elle a 41 ans.
Un peu surprise au départ, presque déstabilisée, elle finit par se laisser embarquer dans l’échange. La curiosité l’emporte.
Christelle est aide-soignante en bloc opératoire, au CHU, depuis 9 ans. Ça fait 13 ans qu’elle exerce au total, mais c’est vraiment le bloc qui la passionne.
“C’est un endroit où on ne s’ennuie jamais. Il y a une super équipe, et j’ai des tâches qui comptent. C’est motivant.”
Elle m’explique comment elle commence ses journées : un écran lui affiche toutes les opérations prévues. Elle sait ce qu’il faut sortir, organiser, ranger, préparer, en fonction des interventions.
C’est elle qui ouvre la salle, qui la rend prête pour l’équipe. Un rôle de l’ombre, mais essentiel.
En dehors du boulot, Christelle fait beaucoup de sport : yoga, fitness, course à pied.
Elle aime aussi jardiner, bricoler, décorer, voyager. Son dernier voyage ? La Corse.
Je lui demande ce qu’elle n’aime pas. Elle réfléchit un peu, puis me répond : l’injustice, la bêtise humaine, la méchanceté gratuite. Et la langue de bœuf.
On rigole ensemble, forcément. On est de la même génération — j’ai 43 ans, elle 41 — alors on a tous les deux ce souvenir de la cantine de ce plat accompagné de cette fameuse sauce infâme.
Je lui demande si elle est heureuse. Elle hésite, puis me dit que “ça va mieux”. Son conjoint est malade, mais il va un peu mieux, alors elle aussi.
Le tram arrive à Hôtel Dieu. Elle descend là, on a eu quelques arrêts mais bien suffisant pour nous donner le sourire à tous les deux : il est 6h55.
Je lui demande un mot de la fin.
“C’était une belle rencontre. Ça change de mes trajets habituels.”
Merci Christelle pour ce moment.
Et peut-être à une prochaine, sur le quai ou dans une rame de tramway.
A.